Giochi dell'Oca e di percorso
(by Luigi Ciompi & Adrian Seville) |
"Vichy et la Liberation" |
Autore: Girard&Quetel |
La défaite désastreuse de Juin 1940, qui scelle la chute de la IIIe République et installe un régime de collaboration à Vichy, a été acceptée par ceux qui se sont rassemblés autour du maréchal Pétain comme l’occasion de restaurer une société hiérarchisée, corporative, familiale et chrétienne. Parmi ces pétainistes, on trouve des ecclésiastiques, des propriétaires fonciers, des officiers de carrière dont de nombreux marins (on dira de Vichy qu’il était "la société protectrice des amiraux"), mais aussi des poilus qui vénèrent le chef de 1917, et des patriotes qui pensent naivement que Pétain joue un double jeu et qu’il n’a fait condamner De Gaulle à mort que pour mieux tromper les Allemands. L’État Français, avec sa nouvelle devise (Travail, Famille, Patrie) et le symbole de la francisque qui marquent le retour aux valeurs traditionnelles d’ordre et d’autorité, a systématiquement recours à la propagande pour essayer de faire passer ses mots d’ordre. Si la radio, la presse, les grands rassemblements en constituent les moteurs les plus puissants, la chanson "Maréchal, nous voilà !" et l’imagerie ont eu leur part. Et parmi cette panoplie propagandiste, on retrouve une fois encore le jeu de l’oie. "Le jeu de la francisque", édité en 1942 et distribué entre autres endroits dans les camps de prisonniers français en Allemagne et dans les camps de jeunesse, est tout à fait représentatif de la propagande vichyssoise. Les cases des oies y sont remplacées par des francisques et les mots d’ordre de la race nouvelle constituent autant de cases bénéfiques qui font avancer le joueur: solidarité, esprit d’équité, mouvements de jeunesse, retour à la terre, discipline, service militaire, mariage avec trois enfants (la famille nombreuse est à l’honneur, à la case d’arrivée). La paresse, le découragement, l’égoisme, le marché noir, sont autant de cases qui font reculer, tandis qu’un nòuveau panthéon met à l’honneur Jeanne d’Arc, Louis XIV, Napoléon, Lyautey, sans oublier le Maréchal qui à la case 62 recommande d’obéir. Plusieurs jeux de l’oie pétainistes vantent aussi les merveilles de l’Empire, comme "Le jeu de l'Empire français" à deux circuits et 84 cases. Il faut bien cela pour voyager à travers un empire colonial aussi vaste, ultime orgueil d’une France occupée. Les produits coloniaux et les charmes du tourisme (malgré les pannes et les piqures de scorpion) n’excluent pas les efforts sanitaires de l’lnstitut Pasteur. Quant à l’immense carte de l’Empire qui trone au centre du jeu et qui répertorie soigneusement toutes les colonies françaises, elle élude la sinistre conjoncture historique du moment en se contentant d’appeler "Europe" tout ce qui n’est pas la France. La Libération a été à son tour convenablement saluée par un jeu de l’oie, le "Jeu de la Libération" qui parait pendant l’automne 1944 dans Libération-Soir. La joie de la liberté retrouvée y ressuscite la tradition satirique. Goebbels, Goering, et bien entendu Hitler y sont ridiculisés pendant que des jeeps (à découper) qui remplacent les pions vont, en 32 cases, du débarquement allié à Berlin. La IVe et la Ve Républiques ont eu elles aussi leurs jeux de l’oie mais bien dégénérés. En effet, alors que le jeu de la francisque, par exemple, collé sur carton en deux volets repliables, est indiscutablement un jeu sur le quel on a joué, les jeux de l’oie postérieurs à la Libération semblent avoir été de plus en plus souvent de pseudo-jeux, prétextes à une satire politique, mais sur lesquels on ne jouait plus. Paraissant dans des journaux, avec des formats de plus en plus petits, un graphisme de moins en moins soigné, ils restent néanmoins aujourd’hui encore un bon support pour la verve journalistique ou syndicale, et continuent tout de meme à raconter l’Histoire de France. |
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